La volonté de capter une émotion n’est pas anodine. A l’époque où
l’image revêt une importance capitale je voudrais revenir sur le sens
donné au portrait. Une photo n’est pas une absolue réalité. Chaque
photographe construit avec son modèle une relation de confiance. C’est
un défi que d’entrer dans l’univers de l’autre. De recette il n’y en a
pas ! Si ce n’est de se vider de soi pour être disponible. Le
photographe apporte du rêve comme à l’inverse de l’angoisse face à
l’incompréhensible. Il est dépositaire de la richesse de la relation
humaine. Il n’y a pas d’ordre venu d’en haut justifiant de voler un
visage. Le sourire de l’enfant, les rides du vieillard ou le ventre rond
d’une mère en devenir. Il garde à l’esprit la blessure du temps et des
faits. Il y a ceux qui sont sur le devant de la scène et d’autres
derrière le miroir. Visages d’un monde intérieur plus riche encore.
L’objectif anime ce lien immédiat, intime et fort. Une façon de jeter un
pont entre l’oreille et l’œil, entre le réel et le rêve. Le quotidien
près de chez nous admirable et préservé comme l’antichambre de faits peu
ordinaires, parfois tristes, souvent drôles. Le portrait s’accorde la
liberté intemporelle. Traverser le temps et retrouver l’image
révélatrice d’une expression originale.
Dany Schaer
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