Corrençon
Monique Freymond, une femme aux multiples facettes
Libre et discrète dans ses propos, Monique Freymond, la fille de
l’instituteur devenue paysanne, se confie. Elle croit toujours
au prince charmant mais a lutté pour être une femme autonome au
sein d’une famille unie et traditionnelle. Elle privilégie
l’élégance du cœur et la sincérité. La foi, l’attachement aux
gens qui l’entourent, la volonté lui ont permis de conquérir le
droit d’être heureuse.
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Dans le petit hameau de Corrençon, une maison cossue et un
paysage à couper le souffle sur les Alpes et la campagne. Ici,
le temps se faufile entre les fleurs du jardin, les bêtes et les
cultures voisines. Monique Freymond est assise près de la
fenêtre, elle raconte avec une discrétion toute personnelle son
parcours hors du commun. Le hasard a-t-il sa place dans cette
vie de femme en équilibre entre la paysanne et la citadine, mère
au foyer puis députée et universitaire, écrivaine, organiste et
visiteuse dans la paroisse du Plateau du Jorat ? Née en 1935 à
Ferlens, elle habite ensuite Denezy puis Lausanne jusqu’à son
installation à la ferme familiale de Corrençon aux côtés de
Jean-Daniel, son mari. D’abord mère au foyer et
paysanne-collaboratrice, elle exerce plus tard des activités
extérieures dans divers domaines comme l’enseignement, la
Justice de Paix, la politique (députée) et l’Eglise. Elle
reprend des études au Gymnase du soir et à l’Université de
Lausanne et obtient une licence en sciences politiques à l’âge
de 49 ans. Une fierté pour ses cinq enfants, dix-sept
petits-enfants et six arrière-petits-enfants.
La musique et les convictions religieuses. Désignée
organiste en 1955 par le pasteur André Mayor, dans la paroisse
de St-Cierges, Monique Freymond partageait cette fonction avec
Anne-Marie Freymond. « Nous nous répartissions la quarantaine de
cultes annuels ainsi que les mariages et services funèbres.
L’instrument de l’époque était un simple harmonium. Après la
rénovation de l’église en 1971 l’achat d’un orgue donna plus
d’éclat et de solennité aux offices». Après le retrait de sa
collègue, Monique Freymond devint seule organiste à
Saint-Cierges avant que les circonstances ne lui offrent la
possibilité de jouer aussi à Boulens et à Martherenges sur des
harmoniums. « A Corrençon, lors des rares cultes annuels,
j’accompagnais les cantiques sur un piano. Une fonction que j’ai
accomplie avec joie de l’été 1955 au 31 décembre 2013, soit
pensant 58 ans. Je la considérais comme un service, un
privilège, une sorte de ministère et un moyen de faire valoir
les talents reçus à ma naissance ».
Visiteuse dans la Paroisse du Plateau du Jorat. Disposant
d’un peu de temps, avec la fin de ses activités politiques et
autres, Monique Freymond choisit de trouver plus de cinquante
personnes âgées de 80 ans et plus habitant la paroisse. « Une
seule visite par après-midi afin que le contact soit confiant et
amical. La visite se terminait souvent avec une tasse de café ou
de thé et une friandise. Parfois j’ai écouté des récits
douloureux, des souvenirs d’injustices ou de malheurs, tout cela
restant confidentiel. J’ai perdu beaucoup de mes visités soit
par décès, une entrée en EMS ou à l’hôpital. Maintenant j’ai
décidé de renoncer et j’ai pris congé des dernières personnes
cette année avec de beaux souvenirs d’amitié dans le cœur ».
ENFANCES, un livre écrit à quatre mains. Monique Freymond
et Anne-Marie Singy écrivent deux récits parallèles de la Broye
au Jorat. Pas de violence, seulement des peines et des joies, du
labeur et des privations, des réalités qui touchent le quotidien
des gens dans les années quarante. « Enfances » est né d’un
contact entre Monique Freymond et Jean-Claude Piguet, directeur
des Editions Mon Village, ancien collègue député. « Dans la
conversation, il m’a suggéré d’écrire mes mémoires en parlant de
l’évolution fulgurante de l’agriculture de la fin de la guerre à
nos jours. En fait, mon enfance ne s’est pas passée dans une
ferme même si, dans un village à majorité paysanne et étant
donné les circonstances difficiles, j’aidais souvent les
familles voisines. Mon père était l’instituteur du village de
Denezy et ce n’est que depuis mon mariage en 1953 que je suis
devenue paysanne et que j’ai pu suivre les bouleversements de la
profession de l’intérieur ». Anne-Marie Singy a vécu à la même
époque dans le village de Domdidier. Deux destins, l’un vécu en
terre fribourgeoise, au sein d’une famille paysanne nombreuse
aux ressources limitées, l’autre, issu d’une famille vaudoise
moyenne dont le père est instituteur de campagne. Clin d’œil au
hasard : la fille de paysan est devenue institutrice et la fille
de l’instituteur a épousé un agriculteur!
Enfances, Editions Mon Village, commande chez moniquefreymondgmail.com
Dany Schaer
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